2025-10-03 12:11:57 - Continuer, pour rappeler l’illégalité et l’impunité du gouvernement israélien. Alors que les premiers et principaux bateaux de la flottille Global Sumud ont été attaqués mercredi soir par Tel-Aviv, les plus petites embarcations continuaient jeudi après-midi de voguer vers les côtes gazaouies. Jeudi midi, le Mikeno, l’un des bateaux de la flottille, parvenait même à pénétrer dans les eaux territoriales palestiniennes, à 20 kilomètres de l’enclave. C’est le dernier bateau à avoir été intercepté par Israël, plus tard dans la journée.
En plus d’intervenir illégalement dans les eaux internationales, la marine israélienne a brouillé les transmissions de la quarantaine de bateaux encore présents. Nous sommes donc sans nouvelles de notre collègue Émilien Urbach – journaliste de l’Humanité ayant embarqué sur le Mia Mia le 31 août – depuis environ 3 heures du matin ce jeudi.
« S’il vous plaît, interpellez les autorités françaises pour qu’elles nous sortent de là rapidement. Merci beaucoup », a-t-il demandé dans un dernier message vidéo. Le gouvernement de Benyamin Netanyahou ne respecte donc ni les conventions de Genève, ni la convention des Nations unies sur le droit de la mer, ni la liberté de la presse, empêchant depuis deux ans les journalistes d’accéder à la bande de Gaza ravagée.
À Gaza, le génocide continue
« Interdire l’entrée des journalistes à Gaza, c’est refuser aux peuples du monde le droit de savoir, affirme à l’Humanité Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ). Le droit international humanitaire (conventions de Genève) protège la présence des journalistes dans les zones de conflit, et les empêcher d’accéder au terrain constitue une atteinte au droit à l’information. » Et de rappeler le courage de nos consœurs et confrères gazaouis, les seuls à pouvoir nous tenir au courant de l’horreur subie ces deux dernières années.
Désormais, les activistes, médecins, élus et journalistes du monde entier qui ont été capturés par Tel-Aviv sont conduits vers les côtes israéliennes et interrogés au port d’Ashdod, non loin de la frontière gazaouie. Selon le ministère des Affaires étrangères, ils « se dirigent en toute sécurité et pacifiquement vers Israël, où les procédures d’expulsion vers l’Europe vont commencer. Les passagers sont sains et saufs et en bonne santé ».
Mais comment croire un gouvernement autoritaire et génocidaire ? Car, dans l’enclave palestinienne occupée, les bombardements israéliens se sont poursuivis, principalement à Deir Al-Balah et sur la ville de Gaza, visant plusieurs hôpitaux. Au moins 20 personnes ont été tuées et d’autres blessées.
La veille, 77 Palestiniens avaient été tués et 222 blessés, selon le ministère de la Santé. « Seuls 1 824 camions » d’aide humanitaire sont entrés au mois de septembre, « sur un total prévu de 18 000 camions, ce qui représente environ 10 % des besoins humanitaires réels des plus de 2,4 millions d’habitants » du territoire palestinien, rapporte ce jeudi dans un communiqué le bureau des médias du gouvernement de la bande de Gaza.
Des soutiens venus des quatre coins du monde
Après avoir écrit au premier ministre, c’est donc à Emmanuel Macron que le directeur de l’Humanité, Fabien Gay, a décidé d’envoyer une missive ce jeudi, dénonçant un « acte de piraterie » et une « entrave inadmissible à la liberté de la presse et au droit d’informer ». « Monsieur le président, il est de votre devoir d’agir avec les équipes du Quai d’Orsay pour porter assistance mais aussi obtenir la libération immédiate de nos 51 compatriotes », a également demandé le sénateur communiste de Seine-Saint-Denis.
Comme Sophie Binet, qui pense aux « syndicalistes » français présents à bord, ainsi qu’aux « camarades italiens, espagnols, suisses, belges ». La secrétaire générale de la CGT appelle en outre à « prendre d’urgence des sanctions fortes pour garantir le respect du droit international et imposer un cessez-le-feu », et à manifester samedi pour « la libération des otages israéliens, des prisonniers politiques palestiniens » et « la solution à deux États ».
Aux quatre coins de la planète, les soutiens du peuple palestinien ont suivi avec attention les dernières heures de la Flottille Global Sumud, un mois après qu’elle est partie de Barcelone pour tenter de briser le blocus inhumain qu’Israël impose à Gaza. À Paris, Berlin (Allemagne), Rome, Florence (Italie), Barcelone, Madrid (Espagne), Londres (Royaume-Uni), Athènes (Grèce), Stockholm (Suède), Mexico, Buenos Aires (Argentine) et tant d’autres villes, des rassemblements ont eu lieu mercredi soir et jeudi pour encourager les passagers de la flottille et réclamer leur libération.
Comme à Kuala Lumpur, où le peuple, très actif dans son soutien aux Gazaouis, s’est mobilisé pour les 34 Malaisiens présents à bord. « Notre mission humanitaire était pacifique, non-violente et pleinement conforme au droit international », rappelait l’une d’eux, la rappeuse Zizi Kirana, dans un message vidéo préenregistré. Le premier ministre Anwar Ibrahim lui-même s’est insurgé : « La sécurité des Malaisiens est une priorité et nous ne resterons jamais silencieux quand leurs droits et leur dignité sont violés », ajoutant qu’Israël avait « piétiné la conscience de la communauté internationale ».
Même son de cloche du président turc, Recep Tayyip Erdogan, pour qui l’arraisonnement « a une fois de plus démontré la folie avec laquelle ces cadres génocidaires tentent de dissimuler leurs crimes contre l’humanité à Gaza ». Des prises de parole fortes, solidaires de leurs populations, qui tranche avec le mutisme des dirigeants occidentaux, français notamment : le communiqué du ministre démissionnaire des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot est largement aligné sur Tel-Aviv.
« Compte tenu du fait que ni les ”grandes” puissances ni les Nations unies ne sont capables de faire respecter le droit international, l’unique solution est la pression sociale et syndicale comme le font aujourd’hui les militants associatifs du monde entier sur les flottilles, rappelle Anthony Bellanger. Bien entendu sur les bateaux, mais aussi et surtout dans la rue dans les grandes capitales mondiales, comme on l’a vu hier soir de façon spontanée. Il y a encore de l’espoir lorsqu’on voit tout ça. »
Article de Axel Nodinot-L'Humanité
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